Image, chiffre, clé...
Intermède 15
Souvent,
les images tombent, s’oublient : ainsi les images du rêve qui, d’ailleurs,
contrairement à une opinion répandue, ne sont pas des images mais des chiffres
[Il est bon de s’installer dans la contradiction : on est sûr alors de capter quelque vérité, sinon…].
L’image
de l’oubli est vide d’image et aussi l’image de l’oubli de l’image du rêve qui
n’en est pas une mais un chiffre.
On
croit se souvenir d’une photo vue en rêve, mais elle n’avait bien sûr, soyons
logique, aucune consistance photographique et ne se suffisait pas à elle-même :
sa clé aussi est perdue. Cette ombre
de photo cryptée qui signifiait autre
chose qu’elle-même, a disparu de la mémoire de ce rêve de la nuit du 25 au 26 février
[on comprendra que l’année importe peu : les rêves se comptent en milliers de nuits].
*
Un
mot revient malgré tout qui pourrait situer ce fantôme sur le planisphère des
songes : Chine.
La reconstitution, à partir de là, invente : des enfants chinois, une photo d’enfants chinois, assis, en rang, une photo de classe d’enfants chinois, la plus belle photo possible d’enfants chinois, des écoliers chinois photographiés assis et côte à côte ravis de poser pour le photographe inexistant, la photo de classe d’un groupe d’enfants chinois : cliché pris sans appareil semblable à toutes les photos de classe de tous les enfants du monde
[on sait d’où
vient le modèle].
Il
est possible que la photographie, parfois, s’anime mais rien n’est sûr.
Un
autre mot s’associe au premier
[car comment rendre les images ici sinon en mots qui à leur tour sont des images, autrement]:
c’est le mot pédagogique… L’association est moins simple qu’il n’y paraît ;
c’est la photo des écoliers qui serait pédagogique.
Mais ce qu’elle transmettrait se dérobe à jamais ; d’ailleurs, cela a-t-il
jamais consisté en quoi que ce soit ?
*
La
reconstitution s’achève après avoir à peine commencé, forcément. L’effort est
vain, le coup de force mental, inutile. Défaillance de l’activité logique qui
s’est aventurée sur des terres qui la font s’échouer : constat d’échec ;
le chiffre de l’énigme de l’oubli est
resté muet, comme le souvenir premier d’un songe, le matin, au réveil, à
l’instant où l’on croit encore aux images alors même qu’elles s’effacent, parce
qu’elles n’en sont pas ; leur trace indéchiffrable s’évapore.
Demeurent
des images de mots, mais c’est autre chose
[hantise
différente]
et, souvent, de celles-là, on voudrait ne plus
se souvenir.
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