« Vois-tu, si un poisson venait me trouver, moi, et me disait qu’il va partir en voyage, je lui demanderais : « Avec quel brochet ? »
N’est-ce pas : « projet », et non : « brochet » que vous voulez dire ? »
CARROLL : « Les aventures d’Alice au Pays des Merveilles » ch.10, p.152.

Brèves d'écran séquence 6 GODARD/ANTONIONI/PABST/VISCONTI/HAWKS/RESNAIS

+ Louise Brooks, Lucia Bosè, Elsa Martinelli, Anna Karina, Monica Vitti, Delphine Seyrig, Brigitte Bardot.
Séquence 6 :

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Trois ans avant « Le Mépris », Antonioni tourne « L’Avventura » en grande partie dans les îles Eoliennes et en Sicile, plus au sud que le Capri du « Mépris » : voyages en Italie… Dans l’une des séquences de « L’Avventura » le personnage de Claudia, joué par Monica Vitti essaie par jeu une perruque brune, jeu de l’identité qui renverrait chez Antonioni à celui de l’identification (d’une femme… Monica Vitti jouera un personnage de brune dans le film suivant d’Antonioni « La Notte » ).
Dans « Scénario du Mépris, Ouverture », Godard propose la synthèse suivante : « En somme, ce qu’il s’agit de faire c’est de réussir un film d’Antonioni, c’est-à-dire de le tourner comme un film de Hawks ou de Hitchcock. » (Il y a, sur les murs des studios de Cinecittà une affiche de « Hatari », de Howard Hawks, avec Elsa Martinelli).
Godard fait subir à « L’Avventura » un renversement, en transformant la problématique des sentiments et des subjectivités (« points de vue »), en faits, en gestes, en actes, en mouvements désaccordés des corps, en accidents…un faisceau de données dotées d’amplitudes variables, un échantillonnage.
Ce qui passe, chez Antonioni, par des distorsions de la durée, et des temporalités paradoxales (ça va trop vite dans quelque chose qui reste trop lent, ou l’inverse, aussi bien) relève chez Godard du télescopage de pièces et de morceaux arrachés à des figures variables du temps ou de son contraire, en particulier à l’éternité du mythe, celui de l’ « Odyssée », en contrepoint, mais mise à mal, selon une chute des corps et une entropie (c’est-à-dire un désaccord, un désordre). Le film abandonne « la liaison de ses effets », « se soucie davantage de la brutalité des émotions que de la contagion qu’elles causent » pour reprendre, par jeu, Hans Lucas.


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Dès son premier long métrage, « Cronaca di un amore » (« Chronique d’un amour », dans lequel il filme Lucia Bosè en se souvenant de la Louise Brooks de « Lulu », de Pabst) Antonioni a inversé les motifs classiques des l’histoire d’un adultère : par exemple, c’est l’enquête commandée par le mari sur la femme qui entraîne l’adultère et non l’inverse ; on sait que ce film est le renversement et la dé-motivation de l’intrigue de « Le facteur sonne toujours deux fois », de James Cain, plusieurs fois adapté au cinéma, en particulier par Visconti dans « Ossessione » (« Les amants diaboliques ») dont « Chronique d’un amour » est le renversement.


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Louise Brooks, Lucia Bosè, Elsa Martinelli, Anna Karina, Monica Vitti, Delphine Seyrig, Brigitte Bardot, respectivement dans « Lulu », de G.W.Pabst, « Chronique d’un amour », de Michelangelo Antonioni, « Hatari », de Howard Hawks (mais ce n’est pas un photogramme du film…), « Vivre sa vie », de Jean-Luc Godard, « L’Avventura », de Michelangelo Antonioni, « L’Année dernière à Marienbad », d’Alain Resnais, « Le Mépris », de Jean-Luc Godard.


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