2- L’introspection :
elle produit une
«image-réflexion » : comment ?
C’est la voix off qui, de façon assez classique,
celle du « monologue intérieur », joue un rôle introspectif.
Ressassement et variation sur la relation fantasmée du fils à son père et du
père à son fils ; par exemple : « Je dois accepter le fait que je ne
te connaissais pas ou que je suis toi, attiré par le même trou sombre… »,
dit Roy.
Mais l’originalité de l’introspection est surtout liée
au genre du film : « L’évaluation psychologique » exigée par le
contrôle militaire de la mission interplanétaire, qui se fait essentiellement
en voix directe, qui devient « off » quelquefois quand s’intercalent
dans la continuité de l’évaluation des plans subjectifs.
Il y a parfois un enchaînement, un croisement entre ces
deux types de voix introspectives.
« Je me vois avec un regard
extérieur », dit Roy au début, c’est-à-dire comme le spectateur le voit. Nouveau
paradoxe : l’introspection est une « extroversion » – ou
extraversion ? – psychologique
machinique.
Utilisant la science et la technique d’un futur
proche, la science-fiction construit
donc un « appareillage » de l’extroversion.
L’appareillage interne de la fusée est aussi
une transposition métaphorique du cabinet de l’analyste et l’« évaluation
psychologique » de Roy, appareillé pour prévenir une « déprime
intersidérale », une transposition de la « cure analytique ».
L’extérieur est la
construction, la projection, cinématographiques, d’un intérieur
fantasmatique : pensons à certains blocs
composites de fugaces image-souvenirs ou images virtuelles, oniriques, et même
fantastiques, où le temps se libère du
mouvement, comme celui du début dépressif de la
solitude de Roy dans le Cépheus en route vers Jupiter et Neptune…
Le cinéma serait donc, ici,
un processus d’objectivation… . d’objectivation de quoi ? D’objectivation
d’une pseudo subjectivité créée par le processus d’objectivation lui-même. On
tourne en rond, me direz-vous. Pourquoi ? Parce que les personnages des
films n’ont pas de subjectivité, ils sont des effets -de réel – auxquels je peux
croire momentanément (« Je sais bien [qu’ils n’existent pas], mais quand
même », emprunt à Octave Mannoni[1]) et le rôle de la
science-fiction, ici, dans cette pseudo-cure qui sert à se débarrasser de l’image
obsédante du père absent et du père lui-même – c’est de donner à l’objectivation d’une pseudo-subjectivité,
à sa création, devrions-nous dire, un outillage sophistiqué et complexe : par
exemple la multiplication des écrans et des micros. Cela me fait une
transition vers la troisième partie :
[1] Titre de chapitre du
livre d'Octave Mannoni, Clefs pour l'imaginaire ou
l'Autre scène, publié aux éditions du Seuil en 1969. « S'introduire sur l'Autre Scène où c'est le jeu du signifiant
qui gouverne. »
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