IV – Appendice : les métaphores
spatiales et l’expression de la maladie :
« Borage and Hellebor filled two scenes ;
Sovereign
plants to purge the veins
Of Melancoly, and cheer the Heart
Of those black fumes which make it smart ;
To
clean the brain of misty fogs,
Which
dull our senses, and soul elogs.
The
best medecine that e'e God made,
For this malady, if well assay’d. »
Robert Burton, The Anatomy of Melancholy[1].
L’ étude qui suit n’étant pas
systématique, la forme anthologique est ici la plus satisfaisante. Quelques
vers de Mélite suffisent à ébaucher le statut de la folie dans le
théâtre baroque : être fou c’est être brutalement (« violenter sa
raison et ses sens… ») séparé de soi-même (« Ne pas demeurer à
soi ») :
« Prends
pitié d’un esprit égaré
Qu’ont mes vives douleurs d’avec moi
séparé… ».
L’emploi de métaphores spatiales est
constant : Eraste « entre en folie », écrit Corneille
dans l’Examen de la pièce ; et il ajoute : « il est
remis dans son bon sens », « cet acte retire Eraste de folie ».
La nourrice s’exprime ainsi :
« Monsieur,
rentrez en vous… »,
Et
Cliton :
« Eraste,
cher ami, quelle mélancolie
Te
met dans le cerveau cet excès de folie. »
La raison chancelante et abandonnée
s’égare comme dans un labyrinthe[2] ;
son parcours a besoin d’un guide :
« Et
ma faible raison de guide dépourvue
Va de
nouveau se perdre en te perdant de vue. »
Les sens sont séduits par leurs
propres productions :
« Votre
douleur vous trouble et forme des nuages
Qui
séduisent vos sens par de fausses images ;
Cet
enfer, ces combats, ne sont qu’illusions. »
Signalons aussi la variété du vocabulaire qu’emploie
« autrui » (les gens sensés sur le théâtre) pour désigner la
folie : mélancolie, frénésie, fureur, furie, rage, ardeur, caprice, manie,
fantaisie, ennui, confusion, aveuglement, charme, enchantement, rêverie ;
ce ne sont pas des synonymes mais ils ne sont pas, sur la scène,
systématiquement employés dans le sens « clinique », relativement
précis, qu’ils avaient au début du XVIIème siècle.
[1] The
Argument of the Frontispiece.
[2] Le
labyrinthe est l’évidente figure de l’égarement. La forme la plus noire et la
plus épouvantable du Dédale est l’enfer lui-même : les deux figures se
superposent, l’enfer devient labyrinthe et le labyrinthe, infernal :
« Captif
du labyrinthe aux inconnus détours,
Où
l’infernale nuit se rencontre toujours » Ariane ravie, Hardy, I. 1.
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