« Vois-tu, si un poisson venait me trouver, moi, et me disait qu’il va partir en voyage, je lui demanderais : « Avec quel brochet ? »
N’est-ce pas : « projet », et non : « brochet » que vous voulez dire ? »
CARROLL : « Les aventures d’Alice au Pays des Merveilles » ch.10, p.152.

Brèves d'écran séquence11:TRUFFAUT/CAMERON/GLORIA STUART/SHYAMALAN/GUS VAN SANT/FELLINI

+ Hong Sangsoo, Arvo Pärt, James Whale, Marcello Mastroianni, Anouk Aimée, Alfred Hitchcock .



Séquence 11 :



° La musique de « Gerry » (2002), de Gus Van Sant et celle du générique final de « T urning gate » (2002), de Hong Sangsoo sont les mêmes, extraites du « Spiegel im Spiegel » d’Arvo Pärt.

° Revu « L’Histoire d’Adèle H. », de François Truffaut : entre « L’Enfant sauvage » et « La Femme d’à côté », en passant par « Les deux anglaises et le continent »… et la chambre sépia d’Adèle H. appelle déjà « la chambre verte »… Etc.








° « L’Histoire d’Adèle H. » : le cinéma de Truffaut est un cinéma expérimental intégré (la beauté secrète de « La Sirène du Mississippi » vient aussi de là : les acteurs jouent à être les personnages et les personnages jouent à être les acteurs) : le caractère obstinément sériel de « L’Histoire d’adèle H. » est intégré à une pathologie autistique évolutive, une exaltation obsessionnelle variable (et esthétiquement variée) qui s’enferme peu à peu dans une structure cristalline : regards aux aguets d’une porte à l’autre, d’un quadrillage vitré à un autre, d’un miroir à l’autre, d’un niveau à un autre (demi-étages, escaliers, claudication des espaces compartimentés, enchevêtrement des cadres) d’un parcours labyrinthique à un autre…, dispositifs baignés d’une dominante sépia , couleur du temps.



° « Titanic », de James Cameron, est la magnifique adaptation d’un roman qu’Henry James n’a jamais écrit.





Gloria Stuart dans « Titanic », de James Cameron.



Gloria Stuart dans « L’Homme invisible », de James Whale.

° Retour à « Phénomènes », de Night M. Shyamalan :
1) Les nuages au générique de début et de fin, à la différence des nuages dans certains films de gus Van Sant (« Gerry », « Elephant »…) que l’on pourrait définir comme des « formalisations sans interprétation », sont ici des « formalisations avec interprétation … », fonctionnelles. L’accélération de ces masses instables est une menace, le symptôme réitéré d’une crise imminente, la désignation d’une origine (le ciel) et d’un agent (l’air) de la catastrophe.
2) Disjonction des espaces, conjonction du son : lors de la séquence chez la vieille dame, le père d’une part, la mère et la fille de l’autre, séparés dans l’espace sont réunis par la proximité sonore grâce à un dispositif architectural, un conduit (auditif), un télé-phone, qui relie une pièce de la maison à la cabane du jardin, « Bouche d’ombre » (Hugo) s’ouvrant dans les murs.

La famille devant la « bouche d’ombre » qui a permis sa réunion.


Fellini, dans une séquence de « La dolce vita » avait expérimenté un dispositif analogue qui séparait et réunissait Marcello et Maddalena, visions partielles et ubiquité vocale formalisant la schizophrénie du personnage interprété par Anouk Aimée, se voulant épouse, se disant putain.

3) On trouve aussi dans cette partie du film une variation sur « Psychose » (Hitchcock/Gus Van Sant) : sur le lit de la vieille dame, une poupée-momie de l’enfance maintenue …
4) Par rapport aux films précédents de Shyamalan, « Phénomènes » semble signer la fin (momentanée ?) des films de deuil, de «Sixième sens » à « La jeune fille de l’eau ».
Au moment de la sortie de « Phénomènes », Shyamalan, dans un numéro de « Dimension cinéma, Gaumont & Pathé », déclarait:
« A mes débuts, le cinéma m’a servi de thérapie. Dans « Sixième sens », j’ai avoué mes angoisses, ma peur de mourir, de perdre les êtres qui me sont chers. A partir de ce moment-là, ma peur a disparu. »
La sienne peut-être, mais pas celle de ses personnages endeuillés.
5) De plus, dans « Phénomènes », pas de paranoïa ; ça recommence à Paris mais on sait à quoi s’en tenir : ce n’est ni un complot politique, ni du terrorisme, c’est de l’écologie, un jeu de la destruction et de l’autodestruction, un retour à l’envoyeur
… (cf séquence 8 point 4, séquence 9 point 5).

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