« Vois-tu, si un poisson venait me trouver, moi, et me disait qu’il va partir en voyage, je lui demanderais : « Avec quel brochet ? »
N’est-ce pas : « projet », et non : « brochet » que vous voulez dire ? »
CARROLL : « Les aventures d’Alice au Pays des Merveilles » ch.10, p.152.

Brèves d'écran/ séquence 20/SHYAMALAN/WELLES



° Les films de M. Night Shyamalan sont intelligents, extrêmement intelligents. Il ne s’agit pas d’un compliment – qui serait convenu – mais d’un constat. L’intelligence et la beauté ont un caractère d’évidence (au moins pour les gens présomptueux) qui dispenserait de s’expliquer si ce n’était pas une habitude, personnelle et collective, un usage intellectuel assez vain mais pas forcément inintéressant.
Cette intelligence est cinématographique: elle tient au fait que tous les éléments de ces films sont parfaitement solidaires et qu’ils convergent dans une émulation qui rend inséparables le scénario et la mise en scène, les personnages et les décors, selon un recyclage permanent et continu de l’un dans et par l’autre. Tout sert à tout, tout est en état de marche. Il est donc difficile des les raconter, ils supportent encore plus mal que d’autres la réduction mutilante à un récit.
C’est peut-être parce que le sujet de ces films, et cela n’a pas assez été dit, c’est la communauté, justement… La communauté des incassables et celle des fragiles, celle des morts et celle des vivants (et celle des morts-vivants, la plus dolente), celle des terrestres et celle des extraterrestres, celle des villages et celles des villes, celle des créatures légendaires et celle des habitants d’un même immeuble, celle des victimes de toxines inconnues qui se réduit progressivement à un seul membre. Toutes sont traversées par la mort, le deuil qui les soude et simultanément menace de les détruire et dont elles essaient, vainement, de s’immuniser.


° Night M. Shyamalan :
« The village » : la communauté endeuillée,
« La jeune fille de l’eau » : la communauté choisie,
« Phénomènes » : la communauté impossible.


° La première fois qu’Orson Welles apparaît dans « The man in the shadow/le salaire du diable », de Jack Arnold, c’est derrière le grillage du ranch sur lequel une plaque porte l’inscription : No trespassing… comme à l’entrée du Xanadu de « Citizen Kane » (d’ailleurs le grillage est semblable), de même que la grande roue de « Le troisième homme », de Carol Reed, rappelle le parc d’attraction de la fin de « The Lady from Shanghaï »… D’un film à l’autre : duplications éparses et fragmentaires de sa marque et de ses obsessions, hantises de formes insidieuses, the man in the shadow.
pour Shyamalan:
pour Welles:

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